5 janvier 2023

Parole aux directeur·ice·s récemment nommé·e·s

© Fanny Trichet
© Fanny Trichet

Claire Staebler

Directrice du Frac des Pays de la Loire depuis 2022

– Quels sont, pour vous, les nouveaux défis du Frac à l’orée des 40 ans ? Quelle orientation souhaitez-vous lui donner ?

« Grâce à l’ouverture en 2021 de l’antenne du Frac sur l’île de Nantes, nous abordons notre quarantaine avec une nouvelle « jeunesse » et beaucoup de dynamisme ! Cette nouvelle configuration en bi-site donne un véritable élan à l’histoire du Frac des Pays de la Loire que je suis toujours en train d’explorer et de découvrir chaque jour depuis mon arrivée au printemps dernier ! Avec l’équipe nous souhaitons à présent développer à la fois des programmes parallèles et cohérent aux spécificités de chaque site et en même temps les relier par des propositions transversales comme nous le faisons actuellement avec le travail de Lina Lapelytè présentée à Nantes et exceptionnellement à Carquefou en janvier 2023. »

– Qu’est ce qui fait la singularité de votre Frac ? Quels sont, selon vous, ses plus grandes richesses et comment souhaitez-vous les valoriser ?

« Il y a plusieurs singularités au Frac des Pays de la Loire comme pour chaque Frac mais dans notre ADN la question des ateliers résidences d’artistes est bien inscrite et participe à l’histoire de notre Frac. Un lieu dédié aux résidences avec ateliers, logements, espaces communs est activé à travers les Ateliers Internationaux qui se développent annuellement depuis 1984 ! Ensuite la qualité architecturale des deux sites est aussi une grande chance et une source d’inspiration pour nous et pour les artistes que je souhaite valoriser afin de mobiliser aussi les publics pour une expérience de l’art différente. »

– Comment envisagez-vous le lien du Frac avec son territoire ? Quels axes souhaitez-vous développer ?

« Le Frac des Pays de la Loire a depuis longtemps tissé de nombreux liens avec de nombreux partenaires régionaux ! Son histoire nomade des vingts premières années a perduré dans la circulation de la collection et de propositions inédites dans des contextes très divers jusqu’à l’exemple récent du MuMO qui circule actuellement dans les cinq départements de la région à la rencontre de publics plutôt éloignés des actions habituelles. Je souhaite continuer à imaginer des projets inédits qu’ils soient agiles ou plus ancrés dans des lieux et des histoires. Pour cela mon équipe qui connait parfaitement le terrain et les acteurs est d’une grande aide. »

– Quelles spécificités de la collection souhaitez-vous mettre en lumière ?

« La présence de la collection est une véritable chance et le point de départ de nombreux projets que nous développons comme « Trilogie de Cendres », une exposition en trois volets menée par Marion Duquerroy et Thomas Fort à partir de la collection avec des productions et des artistes invités qui s’est déroulée de avril à décembre 2022. En 2023 nous avons notamment un projet qui convoquera la figure de Gina Pane à la lumière de pratiques contemporaines. Par ailleurs le comité technique que j’ai constitué a la mission de poursuivre une politique d’acquisition ambitieuse en phase avec l’histoire de la collection et les grands axes déjà développés. »

– Quels sont pour vous les nouveaux publics à mobiliser ? Quelles stratégies et actions souhaitez-vous développer ?

« La question du public reste entière et quotidienne pour nous ! Nous avons démarré des échanges avec le Théâtre de La Fleuriaye à Carquefou et sommes « lieux associés » du Voyage à Nantes et du Voyage en Hiver ! Je crois beaucoup à un public de proximité, si les voisins du Frac viennent nous voir je pense que les autres suivront ! »

© Rita Scaglia
© Rita Scaglia

Fabien Danesi

Directeur du FRAC Corsica depuis 2021

« D’évidence, le FRAC Corsica participe au développement de l’art contemporain sur le territoire insulaire. Cela signifie qu’il aide à la mise en réseau des différentes initiatives visibles en Corse depuis quelques années afin de dynamiser la scène actuelle. Pour cela, il a à coeur de favoriser les rencontres des acteurs locaux, que ce soit les fabriques culturelles comme Providenza à Pieve et Casellarte à Venaco, les laboratoires Casa Conti – Ange Leccia à Oletta et U Staccone à Moltifao, ou encore la Biennale de Bonifacio De Renava. Sur ce territoire rural, il est important que ces actions ne soient pas strictement isolées mais qu’elles cartographient ensemble un écosystème mouvant et fragile, propre aux expressions minoritaires. Le FRAC prend donc pleinement sa part dans la constitution de ce biotope. Mais il a aussi pour volonté de tisser des liens avec d’autres scènes, méditerranéennes, européennes et internationales. Pour une île, l’enjeu d’ouverture au monde est crucial car ses frontières géographiques constituent une distance naturelle avec les autres terres. Ainsi, le FRAC Corsica entend esquiver la contradiction de la modernité soulignée par Bruno Latour : « s’attacher au sol d’une part ; se mondialiser de l’autre ». Il s’agit ici de tenir dans un même mouvement ces deux perspectives en faisant de la Corse un terrain de vie pour les expérimentations plastiques. Nul doute que les hybridations qui en découlent créent alors de nouvelles manières de sentir, d’habiter et de penser cette totalité terrestre qu’il nous faut continuer à disloquer. »

© Marie-José Burki
© Marie-José Burki

Muriel Enjalran

Directrice du Provence-Alpes-Côtes d’Azur depuis 2020

« Les Frac depuis 40 ans ont contribué à sensibiliser des générations de publics à l’art contemporain par leur travail assidu auprès des scolaires et des acteurs du champ social notamment. Force est de constater qu’il reste encore beaucoup à faire pour faire connaitre plus largement ses missions et ses actions auprès des publics que nous qualifions d’éloignés, qui ne sont pas toujours d’ailleurs des publics appartenant aux tranches les plus modestes et défavorisées de la population : on peut être éloigné de l’art pour bien d’autres raisons y compris d’ordre culturel. Aussi il faut que les Frac continuent d’innover et soient toujours plus inventifs sur les manières de toucher d’autres publics. Dans une dynamique de transversalité culturelle, le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur à travers son projet « Faire société », souhaite sensibiliser les publics du sport et des pratiques sportives amateurs. Ainsi à la faveur des jeux olympiques et de l’olympiade culturelle, le Frac a fait des relations de l’art au sport un axe structurant de sa programmation artistique et de la politique d’enrichissement de sa collection. Ainsi, les années 2023 et 2024 verront le Frac Sud – Cité de l’art contemporain construire sur son territoire des projets de résidences artistiques inédites dans des centres d’entrainement et clubs sportifs pour favoriser une réelle rencontre des champs artistique et sportif et permettre le croisement de leurs publics. En 2024, il portera avec d’autres acteurs culturels sur son territoire, une grande exposition thématique « Olympiques », généreuse et vivante qui donnera à voir aux publics de façon réjouissante ce que l’art apporte au sport et le sport à l’art. Le sport participe à la construction d’une culture commune au même titre que l’art. »

© Laurent Lecat
© Laurent Lecat

Pascal Neveux

Directeur du Frac Picardie depuis 2020

« L’hyperproduction, la course frénétique à la nouveauté, la suprématie de l’urgence nous ont parfois fait perdre de vue que l’art que nous défendons a besoin de temps, de présences, de partages, de recherches, de réflexions, de formes longues de compagnonnage avec les artistes, afin que la création contemporaine puisse s’inscrire durablement dans tous les interstices de nos territoires et de nos vies. Les principaux défis qui nous attendent sont de plusieurs natures. Il nous faudra pour être au rendez-vous des enjeux sociétaux, économiques, écologiques et culturels que nous devons relever faire preuve d’adaptabilité, d’agilité et de proximité pour que nos lieux soient en osmose totale avec leur territoire d’implantation, la sociologie et géopolitique de nos territoires tout en nourrissant une capacité d’écoute de tous les instants pour inventer ce qui pourrait être demain un FRAC de troisième génération. Un lieu situé au plus proche de ses habitants tout en étant capable d’être de véritables passeurs et de transmettre le goût, la curiosité, le plaisir de découvrir des démarches artistiques qui empruntent des chemins que nous ne connaissons pas. Le FRAC Picardie de par le caractère unique et exceptionnel de sa collection dédiée au dessin contemporain et par son nouveau projet artistique et culturel intitulé « Ce que les artistes nous disent de la transformation du monde » entend s’affirmer comme le lieu de la recherche, de résidences projets où les artistes sont au cœur de l’ensemble de nos activités et de notre quotidien. L’exposition et l’acquisition n’étant plus une finalité unique mais des étapes d’un long processus d’échanges, de rencontres, de débats, d’usages repensés de nos collections fédérant acteurs culturels, élus, artistes et habitants dans une aventure artistique et esthétique partagée. »

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