25 avril 2023

Tour de France des Frac : 49 Nord 6 Est - Frac Lorraine

49 Nord 6 Est - Frac Lorraine © Photo Fred Dott
49 Nord 6 Est - Frac Lorraine © Photo Fred Dott

Étape N°6 du Tour de France des Frac : 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine

2023 est une année marquée par l’aboutissement et le lancement de plusieurs chantiers. Après celui des collections, dans la perspective de nouvelles réserves, le nouveau site internet du Frac Lorraine a été lancé en début d’année. Aujourd’hui c’est au tour de l’espace d’accueil du 49 Nord 6 Est à Metz d’être reconfiguré. Le Frac Lorraine poursuit sa transformation, comme l’expérience de l’art évolue avec la société.

49 Nord 6 Est Frac Lorraine © Fred Dott
49 Nord 6 Est Frac Lorraine © Fred Dott

Les spécificités du 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine

Le Frac opère en tant qu’espace d’échange et de débat qui soutient la création, la réflexion et l’expérimentation, considérés comme des moyens d’œuvrer contre les replis identitaires. Sa programmation d’expositions, débats, conférences, projections, concerts et performances vise à révéler la pluralité culturelle qui l’entoure. Elle explore les filiations artistiques qui sortent de l’histoire établie, mais aussi les relations entre diasporas, histoires et territoires. Ses activités se déploient sur l’ensemble du territoire lorrain, ainsi qu’à l’échelle du Grand Est en réseau avec le Frac Alsace et le Frac Champagne-Ardenne. Sa collection de plus de 1800 œuvres est attentive à la place accordée aux artistes femmes dans l’écosystème artistique. Elle est déployée sur le territoire en coopération, entre autres, avec les Lycées Agricoles du Grand Est et le Parc Naturel Régional des Vosges du Nord, le Muséum Aquarium de Nancy et la Cité musicale-Metz, ainsi que de nombreux partenaires du champ social et de l’enseignement.

Le chantier des collections du Frac Lorraine

Ce sont plus de 3000 objets issus des collections audiovisuelles et matérielles qui ont été étudiés en 2022 par une équipe spécialement constituée pour cette occasion. Ce chantier se poursuit aujourd’hui par l’étude des œuvres immatérielles ou à protocole. Au-delà de la mise à jour des connaissances du Frac, de la documentation, du bilan sanitaire et du conditionnement, cette opération exceptionnelle permettra de définir ses besoins pour de nouvelles réserves.

Chantier des collections du Frac Lorraine, 2022
Chantier des collections du Frac Lorraine, 2022
Chantier des collections du Frac Lorraine, 2022
Chantier des collections du Frac Lorraine, 2022
Les temps forts de 2023

Pippa Garner, Adelhyd van Bender, Claire Pentecost
Exposition, 17.02.2023 – 20.08.2023, 49 Nord 6 Est

Qu’ont en commun une émancipation de la pensée binaire, la quête d’une formule atomique et une œuvre d’art en voie de décomposition ? Ensemble, elles explorent des exigences et désirs contradictoires, transmis par la société, pour repenser la manière dont le corps humain se relie à son environnement – une écologie des relations à réinventer. Exceptionnellement au 49 Nord 6 Est, trois artistes cohabitent dans des présentations individuelles.

Pippa Garner, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott, courtesy de l’artiste et STARS Gallery, Hollywood
Pippa Garner, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott, courtesy de l’artiste et STARS Gallery, Hollywood

Pippa Garner

Exposition en coopération avec le Kunstverein München et la Kunsthalle Zürich, co-curatée par l’auteure new-yorkaise Fiona Alison Duncan, Maurin Dietrich, directrice du Kunstverein Munich, et Fanny Gonella.

Présentée pour la première fois en France, l’artiste Pippa Garner, née en 1942 dans la banlieue de Chicago et anciennement connue sous le nom de Philip Garner, travaille à déjouer les mécanismes de la consommation, du marketing et du gaspillage. Elle a créé un corpus dense d’œuvres qui vont du dessin à la performance en passant par la sculpture, la vidéo et l’installation.

Son approche sans compromis de la vie et de la pratique artistique lui a permis d’interagir avec les mondes de l’illustration, de l’édition, de la télévision et de l’art sans jamais souscrire à leurs règles. L’exposition rassemble une large sélection d’images et documents qui ont à la fois le statut d’œuvres autonomes et de documentation de sa pratique artistique.

Adelhyd van Bender, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott, courtesy Delmes & Zander, Cologne
Adelhyd van Bender, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott, courtesy Delmes & Zander, Cologne

Adelhyd van Bender

Après un bref passage à l’Académie des Arts de Berlin, Adelhyd van Bender (1950-2014) poursuit une pratique artistique en solitaire. Convaincu qu’il est doté d’un utérus qui contiendrait un « secret atomique », il va tenter sans relâche de décomposer le monde en formules scientifiques.

Dans les dernières années de sa vie, il va produire des œuvres sur papier composées de formes géométriques, de formules mathématiques et chimiques qu’il photocopie et remanie en les superposant à des champs de couleurs, convoquant des superstructures situées à la croisée des sciences, des religions et de la philosophie.

Son œuvre dépeint une tentative de contenir rationnellement une angoisse écologique donnant naissance à un doute existentiel.

Claire Pentecost, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott
Claire Pentecost, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott

Claire Pentecost

Depuis les années 1990, Claire Pentecost (*1956, vit et travaille à Chicago) interroge les structures institutionnelles qui organisent le savoir. Dans sa pratique, elle associe une dimension environnementale à une approche pragmatique des formes pour inventer des registres formels inattendus, à la croisée entre objet utile, symbole et forme abstraite.

Une salle du 49 Nord 6 Est est dédiée au travail qui a été mené pendant un an autour d’une de ses œuvres de la collection du Frac, Proposal for a New American Agriculture (Proposition pour une nouvelle agriculture américaine), par la restauratrice Chloé Barle au sein de l’INP, en dialogue avec l’équipe du Frac.

Degrés Est : Marine Frœliger
Exposition, 17.02.2023 – 20.08.2023, 49 Nord 6 Est

Marine Frœliger, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott
Marine Frœliger, vue d’exposition au 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, février – août 2023 © Photo Fred Dott

L’espace Degrés Est invite à découvrir le travail d’un.e artiste lié.e à la région Grand Est, sur proposition, en alternance, d’un des 3 Frac du Grand Est. Marine Frœliger (*1987, Strasbourg) est artiste, curatrice et médiatrice – un profil singulier qui questionne les modalité d’action au sein du monde artistique. Elle nous invite à une expérimentation méditative paradoxale et propose aux visiteur.euses de prendre le temps d’habiter un espace d’exposition où sont rassemblés des éléments à reconfigurer.

Dans le prolongement de son exposition à la galerie Octave Cowbell à Metz fin 2022, l’artiste nous invite ici à une expérimentation méditative paradoxale. Forte de son expérience de médiatrice, elle propose aux visiteur.euses de prendre le temps « d’habiter » l’espace de Degré Est. Enlevons nos chaussures, installons-nous confortablement sur les tapis et prenons le temps. Combien de temps avons-nous ? Peut-être celui d’attendre l’éruption d’un volcan, ou de patienter pendant sa phase de dormance ? Un temps long que l’artiste aime à utiliser pour évoquer sa pratique, entre observation, production et transmission.

Visite subjective autour de l’exposition A plusieurs (2021) par la Plateforme des Associations Africaines de Moselle.
Visite subjective autour de l’exposition A plusieurs (2021) par la Plateforme des Associations Africaines de Moselle.

Les visites subjectives

Les visites subjectives – réalisées par des personnes, des associations ou des collectifs sans lien direct avec les arts visuels – sont une invitation à entrer différemment dans les expositions. Depuis 2020, voyant.es, mécanicien.nes, danseur.ses, membres des communautés yézidie ou afro-diasporique nous ont guidé.es pour établir d’autres bases d’échange avec les publics.

Projet les Expos en boîte, 2022 © Photo Fred Dott
Projet les Expos en boîte, 2022 © Photo Fred Dott

Les Expos en boîte

En 2020, le Frac Lorraine a lancé un appel pour acquérir des éditions illimitées, diffusables sans limite de quantité, afin d’imaginer d’autres modes de circulation et diffusion de l’art contemporain. Sont ainsi entrés dans la collection des photographies, poèmes, pièces sonores, scénarios à réactiver et dessins de treize artistes. Elles se sont glissées dans un dispositif gratuit à emporter, les Expos en boîtes. Chaque boîte regroupe quatre à six œuvres autour d’un texte littéraire, imaginé par une autrice à partir des œuvres qu’elle a sélectionné.

Artistes : Boris Achour, Rosa Aiello, Morgane Britscher, Marc Buchy, Hélène Fauquet, Penny Goring, Joshua Leon, François Martig, Karolin Meunier, Luzie Meyer, Marianne Mispelaëre, Georgie Nettell et Philipp Schwalb
Autrices : Elise Fontenaille, Fabienne Jacob et Wejdan Nassif

Les œuvres phares de la collection du 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine

Podcast Infiltration au ❤ du 49 6

Le dernier épisode : autour de l’exposition Pippa Garner

Depuis 2021, un groupe de volontaires de la Mission Locale du Pays Messin se retrouve durant une semaine à l’occasion de chaque nouvelle exposition au 49 Nord 6 Est pour créer un podcast autour des œuvres. Iels sont accompagné.es d’un.e artiste qui, par sa pratique, apporte une autre manière d’aborder les œuvres. Le podcast est ensuite diffusé sur les réseaux sociaux et présenté à côté des ressources sur l’exposition mises à disposition des visiteur.ses du Frac.

Les équipes se racontent : les secrets d’une programmation réussie et d’une diffusion optimale auprès des publics

Sophie Potelon, Coordinatrice de la programmation

« La programmation des expositions du Frac Lorraine est majoritairement tournée vers la présentation d’artistes internationaux, peu ou pas montrés en France. La programmation associée (visites, conférences, concerts, workshops, projections…) accompagne les expositions afin de la connecter aux enjeux locaux. Ce lien local peut prendre différentes formes : conception de l’évènement en partenariat avec des structures locales (universités, associations, centre d’art voisins…) ou invitation d’artistes et d’acteurs locaux.

Pour l’exposition de l’artiste américaine Pippa Garner, nous avons mené un travail en amont avec des associations locales LGBTQIA+ afin de mieux comprendre la situation des personnes trans dans le Grand Est et ainsi rendre le Frac disponible pour être un outil pour les associations locales. Nous nous sommes également positionnés comme une « institution apprenante » en suivant une « sensibilisation » aux transidentités avec Mika Alison, plus connue sous le pseudo de @transeignante. Les nombreux tatouages de l’artiste Pippa Garner nous ont connecté avec des tatoueur.euses de la région, nous poussant à interroger ce que pourrait être une pratique queer du tatouage. Des réponses sont apportées par Ginger, artiste tatoueur.euse handpoke lors d’ateliers « Tattoo toi-même » au Frac. L’attitude écologique de Pippa Garner avec l’abandon de la voiture dans les années 90 pour des véhicules à pédales afin de « s’auto-propulser » nous a poussé à regarder les liens possibles entre écologie et théories queer et ainsi proposer une conférence en partenariat avec l’Université du Temps Libre et l’IRTS de Lorraine intitulée « Nature is Queer », modérée par une professeure de l’université Claire Lahuerta.

Nous tentons de mobiliser tous les publics, tous les âges avec une programmation variée, tout en remettant en question la voix de l’institution, comme par exemple avec les visites subjectives où nous prenons un pas de côté et donnons la parole à quelqu’un hors du champ de l’art le temps d’une visite d’expo, avec Pippa Garner ce sont des femmes fans de mécanique qui mènent les visites. »

Équipe du 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine © Photo Fred Dott
Équipe du 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine © Photo Fred Dott

Marine Hardy, Chargée des publics

« Une grande partie de la Lorraine, dans les départements des Vosges et de la Meuse surtout, est rurale et ses habitants ont peu accès à des structures culturelles proches de leur domicile. Le travail de diffusion de la collection par des expositions hors les murs et par des 1 heure 1 œuvre est donc prioritairement axé sur ces zones. Nous avons besoin de tisser des liens de proximité, nécessaires pour établir une relation de confiance avec les associations et les publics qui se sentent loin de l’art contemporain, notamment grâce à des partenariats durables avec des acteurs du champ social (centres de détention, Mission Locale, réseau d’associations d’entraides etc.). Un même groupe va pouvoir revenir plusieurs fois au Frac et petit à petit le considérer comme un lieu familier dans lequel chacun.e est autorisé.e à passer du temps, que ce soit pour visiter une exposition, participer à un événement ou bien profiter du jardin.

En 2021, le Frac Lorraine, dans un projet commun avec le Frac Alsace et le Frac Champagne-Ardenne – nommé Ecotopia -, a mené dans les lycées agricoles lorrains une série de projets : expositions d’œuvres du Frac, workshops d’artistes, concerts, etc. Un projet similaire liera en 2023-2024 les trois Frac du Grand Est aux centres pénitentiaires de la région, touchant ainsi un public particulièrement éloigné de la culture.

Le podcast Infiltrations au ❤ du 49 6, réalisé avec les jeunes de la Mission Locale du pays messin, permet quant à lui de partager avec les publics un autre regard sur les expositions. La diffusion des « Expos en Boîte » à un public varié (associations du champ social, médiathèques, établissements scolaires, centres pénitentiaires) est également le fruit de nos réflexions sur d’autres manières de faire circuler l’art contemporain auprès du plus grand nombre. »

Fanny Gonella, Directrice du 49 Nord 6 Est © Céline Gaille
Fanny Gonella, Directrice du 49 Nord 6 Est © Céline Gaille

Fanny Gonella, Directrice

« Les grands projets pour 2023 sont bien sûr comme toujours les expositions que nous réalisons dans les murs. Cette année, après la pionnière de l’art féministe noir Betye Saar, nous présentons actuellement le travail inclassable de Pippa Garner, à cheval entre art conceptuel, mode et fabrication d’objets incongrus, pour la première fois en Europe, en partenariat avec le Kunstverein de Munich et la Kunsthalle de Zurich. L’automne sera l’occasion de découvrir plusieurs artistes, dont certain.es exposé.es pour la première fois en France, rassemblé.es autour de leur désir de raconter différentes manières d’être ensemble dans une période encore marquée par la gestion de la crise du Covid et le besoin de transformer les mécanismes qui excluent, qui isolent.

Mais il y a aussi eu le lancement du nouveau site internet en début d’année. Nous avons accumulé de nombreuses ressources sur les artistes au fil des ans et cette plateforme nous permet de les mettre à disposition des publics de façon constante.
Quant au chantier des collections, il se concentre cette année sur les œuvres immatérielles – un marqueur de la collection du Frac Lorraine avec ses nombreuses œuvres protocolaires et performances. Mais 2024 sera également intense car l’année marquera le 20e anniversaire de l’installation du Frac dans son bâtiment actuel, l’Hôtel St Livier, qui est le plus ancien édifice civil de Metz. Nous sommes en train de préparer un réaménagement des espaces d’entrée, car 20 ans plus tard, le désir est là d’envisager l’institution culturelle autrement – et donc la manière dont les publics entrent en contact avec nous.

Les 40 ans des Frac marque une continuité dans la transformation. En effet, travailler avec l’art contemporain implique de se confronter en permanence à des approches nouvelles. Tout bouge autour de nous, le rapport à la culture et ses fonctions dans la société changent. La production artistique et culturelle actuelle reflète cela, donc notre travail aussi. Pour continuer à comprendre le monde et rester pertinent, il est essentiel de continuer à se transformer, tout en interrogeant les modalités de rencontre avec les publics. Cet apprentissage continu se fait aujourd’hui non pas de façon insulaire, mais en apprenant des artistes et en incluant les publics dans nos processus d’apprentissage, par exemple en proposant des séminaires à la fois pour l’équipe, les institutions de notre réseau et les publics. »

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