En quoi consiste le métier de chargé.e de publics au sein d’un Frac ? Comment travaille-t-on avec les différents publics et acteurs présents sur les territoires ? Quelles sont les spécificités de ce métier et de chaque Frac ? Y a-t-il des points forts et des points faibles à l’exercice de ce métier ?
Afin d’en connaître davantage sur le métier de chargé·e des publics au sein des Frac, nous avons posé ces questions à des chargé·es des publics, chargé·es de projets de médiation, ou encore chargé·es des projets champ social, médico-social et handicap.
Découvrez ici leurs témoignages !
« Je suis chargée des publics au Frac depuis dix-sept ans. Je conçois et mets en place des dispositifs de médiation qui permettent aux gens d’appréhender les œuvres et de se les approprier, mais aussi de regarder différemment l’art contemporain. J’organise également des conférences et des ateliers au Frac et dans les établissements via le Pass Culture collectif notamment, et je m’occupe du recrutement des médiateurs et de leur formation. Je mets aussi en place des actions dans les quartiers prioritaires de la ville, pour permettre au public de découvrir et s’approprier les ressources culturelles qu’il a à sa disposition. Avec ma collègue Céline Mélissent, nous assurons la formation des travailleurs sociaux, des enseignants et des étudiants. Notre spécificité est d’être proche du public et de pouvoir répondre à ses attentes avec des dispositifs personnalisés.
Les points forts de mon métier, c’est d’être au contact des œuvres et des artistes, de transmettre et de partager ma passion avec le public. Le point faible, c’est le salaire.
On retrouve parmi les enjeux au cœur de ce métier la médiation numérique. Il faut s’adapter pour toucher un public toujours plus large et spécifique. Il est aussi important de travailler à mettre en place des dispositifs pour intéresser les jeunes de 12 à 25 ans. Enfin, il faut pouvoir garantir des espaces adaptés pour recevoir le public et pouvoir développer des actions, telles que des ateliers de pratiques avec des artistes. »
« Une grande partie de la Lorraine, dans les départements des Vosges et de la Meuse surtout, est rurale et ses habitants ont peu accès à des structures culturelles proches de leur domicile. Le travail de diffusion de la collection par des expositions hors les murs et par des « 1 heure, 1 œuvre » est donc prioritairement axé sur ces zones. Nous avons besoin de tisser des liens de proximité, nécessaires pour établir une relation de confiance avec les associations et les publics qui se sentent loin de l’art contemporain, notamment grâce à des partenariats durables avec des acteurs du champ social (centres de détention, Mission Locale, réseau d’associations d’entraides etc.). Un même groupe va pouvoir revenir plusieurs fois au Frac et petit à petit le considérer comme un lieu familier dans lequel chacun.e est autorisé.e à passer du temps, que ce soit pour visiter une exposition, participer à un événement ou bien profiter du jardin.
En 2021, le Frac Lorraine, dans un projet commun avec le Frac Alsace et le Frac Champagne-Ardenne – nommé Ecotopia -, a mené dans les lycées agricoles lorrains une série de projets : expositions d’œuvres du Frac, workshops d’artistes, concerts, etc. Un projet similaire liera en 2023-2024 les trois Frac du Grand Est aux centres pénitentiaires de la région, touchant ainsi un public particulièrement éloigné de la culture.
Le podcast « Infiltrations au ❤ du 49 6 », réalisé avec les jeunes de la Mission Locale du pays messin, permet quant à lui de partager avec les publics un autre regard sur les expositions. La diffusion des « Expos en Boîte » à un public varié (associations du champ social, médiathèques, établissements scolaires, centres pénitentiaires) est également le fruit de nos réflexions sur d’autres manières de faire circuler l’art contemporain auprès du plus grand nombre. »
« Je suis Responsable du Service des publics au Frac Centre-Val de Loire en charge du projet de médiation et de la programmation des événements. Je dirige un service de 4 personnes ayant en charge la programmation culturelle, la médiation pour les individuels et les groupes, la gestion de la librairie-boutique, l’accessibilité aux personnes en situation de handicap, et diverses prestations comme les locations d’espaces. Attentive à tous les publics, j’ai activement participé à l’ouverture du Frac au public familial et au très jeune public, faisant d’eux un public majeur de notre institution. J’ai aussi été membre du comité de pilotage de la 3ème Biennale d’art et d’architecture qui s’est tenue à Vierzon en 2022. Aujourd’hui, les activités des Services des publics sont, en grande majorité, pensées en aval et en fonction de la programmation préétablie. Au Frac Centre-Val de Loire, nous pensons la médiation, non pas comme une mission secondaire, mais comme allant de concert avec le projet artistique.
La médiation culturelle est une profession recouvrant des réalités multiples et variées, qui demeure mal (re)connue, peu visible et insuffisamment valorisée. Une des forces de ce métier est d’aller en permanence à la recherche de nouvelles formes, par exemple en travaillant en lien avec le projet de communication, pour sensibiliser le plus grand nombre à la culture. Dans notre société du numérique, tout le monde participe à la création collective et au maintien des savoirs en partage. La médiation permet d’encourager toute personne à devenir actrice de la construction de connaissances, ayant vocation à devenir le matrimoine et le patrimoine de toutes et tous, mélangeant savoirs et expertises.
Si la médiation a déjà beaucoup évolué depuis son invitation dans les politiques culturelles au début des années 80, elle doit aujourd’hui relever de nouveaux défis, comme accompagner la diversité des formes de participation des habitants, ou encore repenser les liens entre projet artistique et action culturelle. Il ne faut jamais cesser de chercher des stratégies pour accompagner, non plus seulement le développement des publics, mais la participation des habitants dans l’offre artistique et dans la vie culturelle. Au Frac Centre-Val de Loire, nous défendons une redéfinition de notre rapport aux publics, le droit à l’expérimentation et la transformation de notre institution en un espace de débat, une agora où tout peut se dire. »
« Je suis chargé de projets champ social, médico-social et handicap, ainsi que référent accessibilité. Au sein du service des publics, mon rôle est de faire le lien entre les publics et les équipes de médiation, avec un travail de communication spécifique vers les publics-cible. Je travaille également au développement des projets avec les institutions du champ social, du médico-social, du sanitaire et du handicap, et je dois faire le lien avec les artistes intervenant·es dans ces différents cadres. Je m’occupe également de la formation des professionnel.les à la question de l’Éducation Artistique et Culturelle, et de l’autonomisation des professionnel.les sur les projets de coopération culturelle.
Les spécificités du Frac MÉCA sont qu’il possède un positionnement sur un territoire très large et avec de grandes disparités territoriales. De plus, l’équipe est toute récente depuis l’installation du Frac à la MÉCA. Le Frac possède également un important fonds de photographie à exploiter, ainsi que des thématiques territoriales fortes telles que l’expression des africanités à travers les nombreuses œuvres d’artistes africains que possède le Frac.
Les points forts de ce métier sont la construction d’une démarche de projet et d’une démarche de territoire du début à la fin. Le contact avec des professionnel.les en dehors du secteur culturel, et le lien avec les acteur·rices du territoire est aussi intéressant. Enfin, un autre point fort est la créativité des territoires et des artistes dans les différents projets menés.
Depuis l’arrivée à la MÉCA et la création du service des publics, les enjeux au cœur de ce métier sont la consolidation des partenariats territoriaux ; la formation des professionnel·les à l’EAC et à la démarche-projet en milieu culturel ; le développement et la pérennisation des dispositifs ; les canaux de communication spécifiques et enfin les partenariats-relais sur les territoires et vers les publics. »
« Mes missions sont concentrées autour du développement de projet de médiation en relation avec le projet artistique et les expositions du Frac (hors les murs) et les attentes des divers publics. Cela comprend également la conception des outils de médiation en lien avec la programmation hors les murs sur le territoire régional ; le développement des projets en lien avec les publics et pour les publics (scolaires, champ social, sénior, etc.) dans leurs murs et dans nos murs. La spécificité du métier est le travail constant avec des partenaires et des publics différents. Chaque projet est différent et pensé avec et pour les publics. La prospection et la rencontre des partenaires sont essentielles si l’on souhaite diversifier et fidéliser les publics et les partenaires.
L’une des missions d’un Frac étant la diffusion de sa collection sur le territoire, le Frac Grand Large peut être fier du développement de ses actions de sensibilisation à l’art contemporain sur la région Hauts-de-France. Il est important de permettre aux structures/partenaires accueillant des œuvres d’être informées sur les œuvres présentées. Je suis donc amenée à former les équipes et créer des outils de médiation pour les structures partenaires d’accueil des expositions.
Nourri par l’envie de faire découvrir la collection au plus grand nombre, de nouveaux projets de médiation numérique voient le jour. OPEN/FRAC, lancé le 11 mars 2023, permet une nouvelle approche entre l’art contemporain et la réalité augmentée. Pensé comme un nouvel outil de diffusion de la collection, OPEN/FRAC est un projet digital conçu à partir d’œuvres numérisées de la collection du Frac Grand Large. https://www.fracgrandlarge-hdf.fr/evenements/openfrac/
Les points forts de ce métier sont les relations avec les divers partenaires et publics ; avec les artistes/intervenants dans le cadre du développement de projets (ex: projet scolaire avec un·e artiste / projets d’ateliers avec les artistes) ; le champ des possibles – chaque projet étant à inventer, tout est quasiment possible selon les envies des différentes parties (partenaires, publics, artistes); et enfin le déplacement en région (à la rencontre des publics) ainsi qu’à la rencontre des partenaires culturels, ce qui permet de s’enrichir les uns les autres, notamment via des réseaux de territoire.
Et les points faibles sont d’être régulièrement dans la quête et le maintien des contacts (cela peut demander une énergie constante) ; de concevoir des projets à la carte, ce qui demande également un engagement, donc du temps pour développer ces projets ; et enfin le fait que les partenaires n’ont parfois pas les mêmes attentes et objectifs que nous, lorsque l’on concentre toute notre énergie sur un projet et qu’en retour le nombre de participant·es est moindre, cela peut décourager.
Les enjeux au cœur de ce métier sont de s’avoir renouveler les propositions et les actions de médiation ; de réussir à toucher tous les publics et de les rendre acteur·rices (individuels, groupes, scolaires, champ social, en situation de handicap, primo-arrivants) en proposant à chacun des dispositifs, des actions dans lesquels ils se retrouvent et se sentent à l’aise pour découvrir l’art contemporain. »